Un exemple de séjour d’été : les camps scouts

Chemises et foulards, sacs à dos massifs, chants barbares et parfois odeurs à faire fuir les autres passagers du wagon : les scouts en retour de camp sont reconnaissables de loin ! 

Lily Parent, animatrice volontaire, nous offre un éclairage des camps scouts et des idées communes avec les colonies de vacances traditionnelles. Les camps scouts comme un des modèles de colonies de vacances ?
Quelque soit l’avis de chacun, les camps scout ont joué un rôle important dans l’Histoire de la colonie de vacances dans le monde

Le but de cet article est de donner un aperçu global de ce que sont – et ne sont pas – les camps scouts.

La particularité du mouvement scout est d’avoir les mêmes piliers, principes et philosophie à travers le monde. 
Le scoutisme est un mouvement d’éducation populaire qui se donne comme objectif l’éducation pour la paix, à travers trois principes : Les relations avec les autres (la vie d’équipe, l’éducation à la paix et le respect de l’environnement), le développement personnel (intellectuel, émotionnel, physique), et la spiritualité (basée sur la religion ou non).

Ces principes sont déclinés concrètement dans la méthode scoute. Bien que cette méthode soit appliquée sur le terrain avec des variations locales, elle repose partout sur les piliers suivants : l’engagement, le cadre symbolique, la vie dans la nature, la vie en équipe, la progression personnelle et apprendre en faisant.

Le scoutisme se pratique toute l’année. Les groupes se rencontrent régulièrement pour des activités dans leur local, des sorties ou encore des week-ends campés. 

Le camp d’été, qui dure en général de 1 à 3 semaines suivant l’âge des jeunes, est un moyen parmi d’autres de la méthode scoute. Il permet en particulier de mettre en place ce qu’il est difficile de faire à l’année.
Est-ce que le camp scout peut vraiment être associé à une colonie de vacances d’été  traditionnelle ?

Camp scout, une colo comme les autres ?

Attention, question piège ! Mon expérience personnelle se divise en deux camps : ceux (souvent non-scouts) qui trouvent que les scouts sont des arrogants qui croient être les seuls à savoir faire des cabanes et de l’animation de qualité, et ceux (souvent scouts), qui trouvent que les colos sont justes basées sur la consommation et des jeux qui servent à occuper des jeunes sans véritables visée éducative.

Ces points de vue sont souvent avancés par des personnes qui n’ont pas l’expérience du scoutisme, ou pas l’expérience de colos. Des opinions donc peu nuancées et basées surtout sur des a priori.

En essayant d’aller un peu plus loin qu’un manichéisme basique, voici quelques différences et similarités que j’ai pu observer :

Les points communs sont évidemment nombreux : il s’agit d’emmener un groupe de jeunes hors de chez eux pendant plusieurs jours, et de leur proposer des activités (pour la plupart ludiques) basées sur un projet pédagogique et animées par des animateurs formés.

Cependant, il y a au moins deux aspects qui selon moi diffèrent vraiment :

  • Le camp n’étant qu’une proposition parmi d’autre, le groupe se connait avant le séjour et va continuer à vivre des aventures ensemble par la suite. Cela crée une ambiance différente, même par rapport à des colos où certains jeunes reviennent. L’équipe d’adultes se connaît aussi très bien puisqu’elle encadre le groupe toute l’année.
  • Les responsables / chefs scouts (les désignations varient suivant les associations) sont certes animateurs, mais leur rôle ne se limite pas à l’animation. En effet, l’équipe travaille ensemble sur tous les aspects de la préparation du séjour : chercher un lieu, faire le budget et la compta pendant le camp, communiquer avec les parents, concevoir les menus, faire les courses, et évidemment aussi concevoir le projet pédagogique et les activités. Les chefs / responsables sont bénévoles.

Un autre débat récurrent parmi les chefs / responsables scouts est l’idée que les colos n’auraient pas de but éducatif (contrairement au scoutisme), et seraient donc plus pauvres pour les jeunes. Cette hiérarchisation n’a à mon avis pas de raison d’être, car la qualité des séjours (colos ou camp scout) dépend dans tous les cas de l’engagement de l’équipe pédagogique et du projet mis en place.

La méthode scoute en camp

Qu’est-ce que permet un camp scout qu’il n’est pas possible de faire à l’année ? 

1) Simplicité volontaire

La simplicité volontaire, c’est partir joyeusement passer 3 semaines dans la campagne, sans :

  • eau courante (et tout ce que ça implique : vaisselle à la main, toilettes sèches, douche à l’arrosoir…)
  • téléphone portable
  • douche chaude
  • moyen de rester sec quand il pleut des trombes pendant plusieurs jours,
  • matelas moelleux,

Cette simplicité est plus difficile à trouver en ville, alors qu’en camp, c’est simple, on n’a pas le choix ! Le coucher se fait sous tente. La plupart du temps, les premiers jours sont consacrés aux installations. Le camp se passe dans une pâture prêtée par un agriculteur ou sur un bout de forêt, et il faut donc tout construire : une table pour manger, des douches (ou plutôt des cabines en bâches dans lesquelles on se lave au seau), des toilettes sèches, une table à feu pour préparer à manger, etc.

La simplicité volontaire est aussi vécue à travers les activités proposées. Les activités sont souvent peu coûteuses : des grands jeux, des activités manuelles ou de réflexion, des marches… Il n’y a généralement pas d’activités de prestations extérieures, ou en tout cas elles restent des exceptions, liées à un projet pédagogique spécifique. L’accent est mis plutôt sur la qualité des costumes et du matériel qui permettent de construire un imaginaire vivant.

2) Autonomie et coopération

Le groupe est organisé en équipe de 6 à 8 jeunes. Les équipes sont composées de manière à être hétérogènes en âge, expérience du scoutisme, maturité, caractères, etc. Les membres les plus expérimentés et les plus matures se voient attribuer un rôle spécial (sizenier, pilote, chef de patrouille, etc) : ils sont chargés de guider l’équipe dans la vie quotidienne et servent de relais avec les chefs / responsables.

Chez les plus jeunes, les équipes servent surtout à organiser les services (préparer les repas, faire la vaisselle, chercher le bois et l’eau, etc.) et le coucher. La vie en équipe prend une place plus importante à partir de 11 ans. On passe alors dans une autre tranche d’âge, et l’organisation change légèrement. Les équipe se voient par exemple confier la tâche de se construire un « coin d’équipe » : un lieu de vie pour la durée du camp, où il y aura non seulement la (ou les) tente (s), mais aussi une table, un vaisselier, une table à feu, éventuellement des toilettes.

L’équipe est ainsi autonome. Dans la plupart des groupes, le repas du midi est cuisiné en autonomie par chaque équipe. Le repas du soir est cuisiné par une équipe et pris en grand groupe, et la plupart des activités se déroulent également en groupe entier. L’équipe sert de base pour la vie quotidienne.

La plupart du temps, les jeunes partent également en randonnée en autonomie par équipe pendant quelques jours. Les adultes les surveillent de loin en faisant des tours en voiture et en maintenant un contact téléphonique (quand il y a du réseau !), mais les jeunes passent quelques jours seuls sur la route, avec un itinéraire à suivre et un budget à gérer. Parfois, ils doivent également trouver leur hébergement le soir même en arrivant dans les villages.

L’autonomie est présente aussi dans la confiance placée dans les capacités des jeunes. A partir de 7-8 ans, on fait confiance aux jeunes pour utiliser les outils (scie, hache…), faire du feu, cuisiner, etc. Bien sûr, les choses potentiellement dangereuses sont sous la supervision des adultes pour les plus jeunes.

3) Projets de jeunes : progression personnelle et démocratie participative

Le scoutisme se voit comme une méthode d’éducation populaire, et porte donc une attention particulière à la progression de chaque jeune.

A chaque tranche d’âge, des processus sont mis en place pour que les jeunes acquièrent, construisent leurs compétences dans les domaines qui les intéressent.
Chez les SGDF, les plus jeunes récoltent des « atouts », chez les EEUDF ils suivent des « pistes ». Le principe est similaire. L’enfant choisit d’abord un domaine qu’il a envie d’explorer : connaître la nature, prendre soin de son corps, animer un groupe, communiquer, développer sa vie spirituelle, etc. Accompagné par un chef / responsable, il imagine ensuite le moyen de construire la compétence puis de la valoriser devant tout le groupe. Les enfants sont ainsi amenés à réaliser des constructions en autonomie, à animer des petits jeux, à cuisiner, etc. La réussite d’un chef d’œuvre permet de gagner un écusson à coudre sur sa chemise pour montrer sa progression.

Ce principe de progression personnelle existe pour toutes les tranches d’âge. Le camp est le moment privilégié pour la mettre en place, car il permet de suivre un projet sur plusieurs jours.

Les jeunes ont l’occasion de donner leur avis et de construire des projets grâce aux conseils qui sont mis en place régulièrement : conseils d’équipe, conseils de groupe, conseils des plus âgés ou des « chefs d’équipe », etc. Ces conseils permettent de faire de bilans réguliers et de prendre des décisions.

Certains camps sont articulés autour d’un projet ambitieux porté par le groupe entier : organiser un spectacle, enregistrer un conte musical, descendre une rivière en radeau, faire un camp itinérant en vélo, etc. 

Conclusion

Colos et camps scouts sont-ils si différents ? Les nuances sont plus subtiles qu’on pourrait le penser au premier abord. La différence est sans doute moindre entre un camp scout et une colo dans la nature où les enfants cuisinent (comme celles, par exemple, de la Bidouillerie), qu’entre cette même colo et un séjour 100% activités de prestations de service conçu pour un CE plus que pour les jeunes.

Simplicité volontaire, vie d’équipe, projets de jeunes : Ces éléments existent dans des colos proposées par divers organismes, ce ne sont pas tous des particularités du scoutisme. Ce qui est spécifique par contre, c’est la combinaison de tous ces éléments, la dimension mondiale, et l’envie de vivre une aventure sur long terme avec les mêmes personnes.

Adolescence + vie en groupe + défis : Ça donne forcément des souvenirs impérissables, que ce soit dans le cadre du scoutisme ou pas !