« Personne n’éduque autrui, personne ne s’éduque seul, les hommes s’éduquent ensemble par l’intermédiaire du monde. » (Paulo Freire)
C’est à Montalivet-les-bains, petite ville des landes , à quelques minutes à pied de l’océan que se situent nos séjours enfants. Des jeunes de 6 ans, 7 ans, 8 ans, 9 ans ou 10 ans … viennent chaque été pour y vivre une colo pas-comme-les-autres où on les accompagne à organiser eux-même leurs vacances.
Une colo où ce sont les enfants qui font leurs vacances : pourquoi faire ?
Déjà parce qu’ils en ont le Droit. En les laissant prendre une part à l’organisation de leurs vacances nous respectons l’article 12 et 13 de la convention internationale des droits de l’enfant qui garantit aux enfants le droit de s’exprimer sur toute question qui les concernent et d’exprimer leurs opinions et leurs convictions.
Ensuite, parce que nous pensons que la colo devrait avant tout servir à rencontrer de nouvelles personnes, à faire de nouvelles expériences en dehors du quotidien habituel . Ainsi, dans nos séjours les enfants viennent de partout et de tous milieux sociaux. C’est un choix motivé par la conviction qu’il n’y a pas d’autres solutions pour apprendre à coexister pacifiquement avec les autres que se retrouver à vivre ensemble, à manger ensemble, à dormir ensemble, à s’amuser ensemble et à décider ensemble. Nous pensons qu’un enfant qui n’est jamais sorti de sa bulle sociale aura plus de difficultés à éprouver de l’empathie pour un autre enfant qui ne vient pas du même environnement social et qu’il aura donc tendance à développer des craintes, des aprioris, des images fausses sur l’autre. C’est pourquoi nous pensons que c’est surtout à ça que sert la colo : rencontrer de nouvelles personnes, des personnes différentes et apprendre à vivre ensemble dans le respect et l’acceptation de ces différences.
Or, quel meilleur moyen pour vivre ensemble que de se retrouver autour d’une idée commune stimulante que l’on souhaite mener ? Et pour faire des trucs ensemble, les enfants ont toujours des idées. Il s’agira donc de leur offrir un cadre adapté à la concertation et à la prise en compte de chacun. Car écouter son prochain, ça n’est inné pour personne : cela s’apprend. C’est pourquoi nous mettons en place des « concertations d’enfant » et des « projets d’enfant » qui sont des outils pédagogiques à la mécanique bien huilée éprouvée par des années de pratique et de réglages.
Enfin, par cohérence et pour permettre aux enfants de prendre du plaisir ! Il nous semble en effet particulièrement contradictoire d’imposer aux enfants des activités pour qu’ils s’amusent. Quels adultes accepteraient qu’on les emmène de force faire une partie d’échec, voir un film ou faire de l’accrobranche alors qu’il n’en a pas envie ? En demandant aux enfants de décider ensemble des activités à organiser, en les mettant en place avec eux nous retrouvons le plaisir du jeu, de l’exploration et de la création qui sont de formidables moteurs de l’apprentissage. C’est aussi le moyen de responsabiliser et d’autonomiser les enfants qui deviennent acteurs et non plus consommateurs de leurs vacances. Ainsi, un enfant qui aurait choisi de ne pas participer aux décisions et à l’organisation des activités pourrait difficilement s’en prendre à un autre si le programme ne lui convient pas. D’autant que ce sont les autres enfants qui se sont démenés pour inventer et organiser des activités pour le groupe. Par ailleurs c’est aussi un moyen d’accompagner les enfants à se découvrir autrement, à développer des capacités, des savoirs faire ou à explorer des centres d’intérêts nouveaux.
La colo, comme nous la concevons, permet donc avant tout à l’enfant de faire des rencontres, de créer des situations plaisantes, agréables qui favorisent les échanges et les apprentissages.
Mais une colo où les enfants décident : à quoi ça ressemble ?
Le village et le camp : deux univers complémentaires pour que chacun y trouve son compte
A Montalivet, il existe deux « espaces » distincts : le camp et le village. Chaque tranche d’âge a un camp qui lui est propre. Chaque groupe a également sa propre organisation, ses règles de vie, son équipe d’animateurs, son planning. Dans le village, tout le monde se croise : jeunes et enfants, animateurs, directeurs, bénévoles, artistes. A l’inverse des groupes, il s’agit d’un espace qui existe surtout dans l’informel des rencontres, du hasard et parfois des rendez-vous. Ce fonctionnement permet aux enfants de profiter des avantages d’un petit groupe, d’une organisation ritualisée et donc sécurisante et des avantages d’une grande colo avec une grande réserve de matériel, des adultes disponibles, des jeunes plus grands et des choses à faire seul ou ensemble (animer l’agora, s’occuper des poules, bricoler, participer à l’activité d’un bénévole, faire de la musique avec l’artiste en résidence, jouer à des jeuxavec des plus grands…). Certains enfants investiront fortement la vie démocratique de leur groupe tandis que d’autres trouveront plutôt leur compte dans la vie du village. Mais les deux espaces ne se percutent pas, ils existent en parallèle. Le seul lien reliant ces deux écosystèmes étant les enfants eux-mêmes qui passent de l’un à l’autre aussi naturellement qu’on passe de la maison à la rue, de l’école à la ville. Dans cet article, nous nous concentrerons surtout sur la participation des enfants dans le camp.
Les 6-10 ans : un groupe à taille humaine
Un trop grand nombre d’enfants ne permet pas facilement de s’intégrer quand on a 6 ans, 7 ans, 8 ans… Surtout qu’il s’agit pour beaucoup d’un premier départ. C’est pourquoi à Montalivet, la taille du groupe est adaptée à la tranche d’âge. Ainsi le groupe des enfants accueille jusqu’à 24 jeunes de 6ans, 7ans, 8ans, 9ans ou 10 ans (contre 36 dans les groupes ados). Nous veillons aussi à la composition des chambres : les enfants de 6 et 7 ans sont souvent séparés des plus grands de 8 ans, 9 ans, 10 ans (à moins d’une demande au moment de l’inscription, pour des amis ou des fratries par exemple). Bien que nous ayons choisi une tranche d’âge qui corresponde à l’univers des enfants : l’école élémentaire, la fourchette d’âge (de 6 à 10 ans) est assez large pour permettre une mixité d’âge qui n’existe pas dans une classe. Le village permet d’ouvrir encore plus cette mixité sans la rendre insécurisante pour les plus jeunes.
Cela permet d’avoir un groupe plus restreint et convivial qui rende réellement possible la participation et l’inclusion à un âge où il n’est pas toujours facile de s’écouter, de se faire sa place ou de la laisser. Dans cette atmosphère plus familiale l’échange est ainsi facilité et les enfants créent des liens plus facilement dès le premier jour.
Généralement, les enfants de ce groupe restent une semaine. C’est d’ailleurs ce que nous conseillons aux parents de choisir s’il s’agit d’un premier séjour. On le rappelle lorsque l’occasion se présente : mieux vaut que l’enfant rentre à la maison un peu frustré plutôt que fatigué, voir lassé des derniers jours trop longs loin de sa famille. C’est en tout cas souvent une réalité pour les premières expériences, la plupart des jeunes habitués à nos séjours préfèreront les deux semaines notamment quand ils arrivent dans le groupe des pré-ados.
Un aménagement du camp qui favorise l’autonomie des enfants
Ensuite, pour qu’un enfant puisse construire son séjour, il nous semble indispensable que son environnement matériel soit réfléchi et adapté. Ainsi l’aménagement des espaces est très important pour qu’un enfant puisse se l’approprier et devenir « autonome », c’est-à-dire ne pas être dépendant des animateurs dans la réalisation de certaines tâches. Un affichage clair en salle d’activité permet par exemple à l’enfant d’être autonome lorsqu’il cherche du matériel pour son activité. Une affiche dans la chambre lui permettra de savoir quoi emmener pour aller à la plage et un espace bien identifié lui indiquera où retrouver une affaire perdue.
Des règles de vie sécurisantes qui s’offrent à l’échange
Un bon cadre (ou « règles de vies ») sera aussi un ingrédient indispensable pour mettre en place la participation et ce n’est pas parce que nous donnons de la liberté aux enfants que l’adulte ne peut pas intervenir, au contraire, cela pourrait être dangereux, déstabilisant, anxiogène pour l’enfant de ne pas savoir ce qu’il a le droit ou non de faire et pourquoi. Pour nous un bon cadre c’est un cadre clair, juste, prévisible porté par une équipe cohérente et bienveillante . Il existe pour cela une constitution qui garantit à tous les mêmes droits sur le village et des « carrés lois » qui précisent les règles de vie d’un camp. Pour ne pas faire de démagogie, nous y distinguons les carrés lois « fixes » qui font partie du socle du séjour et qui ne sont pas négociables et les carrés lois « modifiables » qui pourront évoluer au fil des assemblées et des semaines durant l’été. Ainsi la marge de manœuvre des enfants est clairement définie et les règles immuables sont justifiées par la loi, la constitution du village ou la sécurité physique et affective de tous.
Un quotidien bien réglé où s’équilibrent tous les temps dont ont besoin les enfants
Un bon environnement ne serait rien sans un quotidien régulier et dans lequel il est facile de se situer. Le secret c’est la répétition. En effet, les enfants ont besoin de repères temporels clairs et prévisibles. Rien n’est plus insécurisant que des journées qui s’enchaînent sans logique apparente, sans moments qui se répètent, sans que ne soit clairement défini à quelle heure on mange, on se douche où on joue .. Pour rythmer les journées et aider les enfants à se repérer dans le temps, nous mettons en place des « rituels », toujours les mêmes. Ce sera par exemple une chanson avant le temps des douches ou du rangement, un check dans la main lorsqu’on est prêt à aller se baigner, un jeu avant le départ en activité… En bref, une habitude. C’est en effet parce que l’enfant sait qu’il entendra la chanson du repas 5min avant l’heure d’aller manger qu’il peut s’adonner pleinement à la préparation de la veillée ou à l’écriture de sa chanson avec l’artiste. Il n’aura pas besoin de demander trois fois à un animateur « quand est-ce qu’on mange ? » parce qu’il s’inquiète d’être oublié pour le repas : il sait.
Une équipe d’animateurs compétente et à l’écoute
Enfin un bon environnement pour un enfant, c’est une équipe d’animateurs disponible, formée et cohérente qui sait se positionner pour jongler entre tenir un cadre sécurisant et laisser l’enfant faire ses expériences. La réglementation impose 1 animateur pour 12 enfants maximum. A Evasoleil, nous préférons renforcer cet effectif avec un animateur pour 6 à 8 enfants. C’est donc une équipe de 3 animateurs et animatrices qui s’occupent du groupe des 6-10 ans. Sur cette page, il est d’ailleurs possible de découvrir les animateurs de l’été prochain : équipe d’animation. Nous pensons que la préparation du séjour, avec eux, est essentielle à la réussite du séjour. Ainsi nous recrutons ces animateurs entre janvier et juin et les formons à notre pédagogie au printemps ainsi que lors d’une journée de préparation en physique. Nous réfléchissons, formons, échangeons des semaines durant avec les équipes afin que leurs qualités se conjuguent avec un modèle pédagogique réfléchi en commun.
Ce « projet pédagogique » particulier est notamment composé d’outils développé au fil des années et des séjours. Parmi ces outils, les plus emblématiques d’Evasoleil sont sans doute « l’assemblée et le « projet d’enfant ».